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Emmitouflé dans sa veste rembourrée, un sac à dos fixé aux épaules, Sungjoon déambule dans les méandres de ses souvenirs, le nez fixé vers les nuages qui s'en donnent à coeur joie. Du ciel blanchâtre
dégringolent d'audacieux flocons de neige , et ces petits fragments de vie s'accrochent dans les cheveux, sur les manteaux, aux coins des yeux.
Le réalisateur trimballe avec lui ses habitudes d'amoureux de l'objectif. La façon dont il gère les espaces, dont il observe les différentes femmes qu'il côtoie, donne l'impression qu'il n'a jamais vraiment quitté sa caméra : c'est lui qui donne le rythme à chaque fois, qui place les autres acteurs comme bon lui semble, disposant à sa guise des figurants. Guidé par une envie terrible d'extase, Sungjoon, en quelques jours seulement, perturbe le tranquille équilibre du quartier de Séoul dont il s'approprie l'âme , rattrapant au vol des bribes entières de sa mémoire. Le film, en apparence très posé, offre pourtant de grands instants de fougue, et toute la frénésie contenue des personnages éclate sans crier gare, dans une minuscule chambre triste ou
au détour d'une rue déserte, symbolisée par un baiser teinté de solitude dont les amants semblent se repaitre comme si c'était leur dernier repas.

 
 
Hong Sang-soo captive les esprits sans s'agiter.
L'intérêt du film réside dans les détails, les discussions échangées au dessus de verres troubles, dans les lieux que l'on retrouve mainte fois.
En fait, on se sent un peu chez nous, quand bien même le film ne dure qu'une heure et quart, c'est à se demander s'il n'est pas magicien.
Sungjoon lui-même se retrouve pris au piège, la silhouette lacérée par les griffes du Temps, le regard troublé par sa prise de conscience : est-il, finalement, trop tard?