Les bras croisés sur son torse nappé de miel, un jeune garçon songe à la mort. Encerclé par des dizaines de mains cramponnées à des stylos, grattant lignes sur lignes avec fureur, il se sent comme un fauve en cage. Ses yeux s’abîment sur la nuque de la jolie fille assise devant lui. D’os et de sang sont les rainures qu’il imagine sous la fine écharpe coulée autour de son cou, boa de laine fondu à un petit morceau d’ivoire. Elle suce lentement le capuchon sans faire de bruit, il s’imagine sur elle l’espace d’un battement de coeur. Dehors, une poignée d’hirondelles se disputent un morceau de pain, fendant l’air de leurs ailes électriques. L’atmosphère, chargée d’ennui, colle à la peau du gosse qui pète les plombs. Chassant les feuilles laiteuses de sa table d’un grand geste de la main, il se dresse sur ses baskets et grimpe sur la surface qui s’offre à lui. Du haut de son perchoir il commence à gueuler, mâchant des rimes et crachant sa violence, son bassin disloqué, marquant le rythme de sa langue. Mouillée en plein coeur, la fille se lève et plonge ses yeux dans les siens. Instinctivement, il lui tend une main qu’elle hésite à saisir…

Les kids ont déposé les armes de l’insouciance, rugissant leur peine sous le sein des étoiles. Enduites de gravités, leurs gorges se serrent lorsqu’elles chantent le passé. Foda, surtout, s’assagit (ça me plaît peut être moins qu’avant) et laisse une place immense à Lujipeka qui trimballe sa mélancolie démentielle sur absolument tous les morceaux (sauf Woohooo, fortement désagréable) pour atteindre une zone rarement explorée avec autant de justesse, lors de Château de sable, la dernière track de l’album. Immense déclaration d’amour au Temps qui fuit, à la vacuité plastique d’une vie sur le déclin dont les contours marqués au fer blanc crépitent de rage à en faire pâlir les mouches vrombissant à la bouche de quelques cadavres mousseux amassés aux pieds d’un lit une place.

Mais quoi?

« Le ciel est rouge les nuages sont noir […] t’es bipolaire ou t’es juste bizarre?« 

Elle joue avec mon âme depuis toujours , passant sa langue molle sur les contours de mes yeux, de mon cou et de mes lèvres, je me laisse faire, mais à quoi bon?

ça finira forcément six mètres sous terre, nos corps nus bouffés par un millier de vers aspirant goulûment nos chairs,

DISPARAIS !

ou tends tes lèvres à la lueur d’une Lune nouvelle que nous seuls pourrons aimer.