Au dernier arrivé de cette tour infernale – métaphore bétonnée d’un puissant schizophrène – que j’aperçus ce matin, couché sur un transat, le corps gorgé de soleil, permets-moi de t’avertir. Ils sont tous siphonnés et te contamineront, quoique tu fasses. Maintenant, je remarque en eux la crainte du monde extérieur. J’ai vu, précipité de son trône, l’Architecte déçu, gonflé d’orgueil et claudiquant, goûtant régulièrement les femmes des autres, assombrirent les êtres qu’il croise.
Ils tremblent tous ensemble pour aider leur sang transparent à circuler dans le réseau de leur immeuble – corps de béton imbibé de folie.


Dans l’ouverture noire et béante, honteuse d’humidité, le Dr Robert Laing s’allonge puis se dépossède, cravate nouée jusqu’à la moelle, cigarette insolente aux bords des lèvres.

je m’y suis sentie bien, dans ce building

Ben Wheatley ne néglige aucun détail et possède son sujet à fond ; et pourtant, tout ce joyeux bordel semble s’animer tout seul, sans maitre extérieur pour le guider.
Les habitants des bas niveaux, ivres de hauteur, s’abiment peu à peu dans le bassin de leurs pulsions, chlorés jusqu’à l’âme.
Cerise sur le gâteau, la bande sonore est incroyable d’ingéniosité, mes oreilles en bourdonnent encore de plaisir. Le petit côté rétro du film (l’action se déroule en 75 ) apporte un sacré plus à l’ensemble, notamment une flopée de femmes toutes plus canons les unes que les autres, enivrantes à en rouler ivre-mort sous la table du salon.

L’habileté de l’objectif à se mouvoir silencieusement entre les cloisons, tel un chat fantôme, et à capter les corps pulvérisés de lumière et hypra sexués des locataires, n’a d’égal que l’intelligence du propos. Et si demain venait à se construire une tour aux allures de phalange divine pas loin de chez moi, il est certain que j’irai l’explorer.
Il est vivant, ce building, en lui résonne les murmures des insatisfaits, et les échos des cris des mômes dont les parents se foutent comme du tri des déchets, overdose de nudité.